Orfeo in laguna | Orphée à Venise
Alessandro GRANDI
Serenissime Stelle
Serenissime stelle
Che dal Ciel d’un bel volto
Vi scopriste a la notte del mio core
Così lucide, e belle
Non tenete più involto
Fra le nubi di sdegno il bel splendore;
Lasciate il rio costume,
E scoprite al mio Polo eterno lume.
(Pomponio Montenaro)
Étoiles sereines
Qui depuis le ciel d’un beau visage
Vous dévoilez au cœur de mon cœur
Si brillantes et si belles
Ne gardez plus enveloppée
Dans les brumes du dédain votre splendeur ;
Abandonnez votre attitude dédaigneuse
Et découvrez à mon regard une lumière éternelle.
Alessandro GRANDI
O donna troppo cruda
O donna troppo cruda e troppo bella,
da voi vien la mia sorte,
voi siete la mia vita e la mia morte.
Ma se la morte siete,
perché la vita ne’ begli occhi avete?
E se siete la vita, ché non mi date aita?
Ô femme trop dure et trop belle,
De vous vient mon destin, vous êtes ma vie et ma mort.
Mais si vous êtes la mort
Pourquoi avez-vous la vie dans vos beaux yeux ?
Et si vous êtes la vie, pourquoi ne me secourez-vous pas ?
Alessandro GRANDI
Ohimè l’antica fiamma
Ohimè l’antica fiamma ch’era sopita
Ch’era sopita all’aura d’una sola dolcissima parola,
Si desta e nel mio cor arde e sfavilla !
Lasso, ch’incontro Amore
Quando le prime sue dolcezza sfavilla
In un tenero core
Né sdegno né dolore
Ne tempo ne ragion’ ne morte vale;
Chi spegn’antic’incendio il fa immortale.
(Giovanni Battista Guarini)
Hélas, l’ancienne flamme qui était endormie
Dans l’aura d’un seul mot doux,
Est réveillée et dans mon cœur brûle et étincelle !
Las ! que je rencontre l’Amour !
Quand ses premières douceurs se glissent
Dans un cœur tendre
Ni le dédain, ni le chagrin
Ni le temps, ni la raison, ni la mort ne valent ;
Celui qui éteint un ancien feu le rend immortel.
Biagio MARINI
Se nel sereno viso
Se nel sereno viso
hanno due chiari soli un paradiso
se nell’illustre seno
occhio qualor discerni
scorgi ligustri eterni,
se nelle labbra ascose
stanno dentro le Grazie e fuor le rose non è stupor se pieno
di meraviglia i grido habbiasi il core
il ritratto di Venere e Amore.
(Maurizio Moro)
Si, sur le visage paisible, deux soleils brillants se partagent un paradis
si, dans une noble poitrine,
les yeux voient des lumières éternelles,
si, sur les lèvres sèches
les Grâces sont au-dedans
et les roses au dehor
il n’est pas surprenant que le cœur du cri merveilleux
ressemble au portrait de Vénus et de l’Amour.
Martino PESENTI
Non ti doler mio core
Non ti doler mio core,
s’a l’amorosa fede
non ritrovi mercede.
Nasce dal tuo tacere il tuo dolore
E non v’ha colpa amore.
Se tu celi l’incendio, altri no’l vede,
né merita pietà chi non la chiede.
Ne te chagrine pas mon cœur
Si tu ne trouves pas récompensée ta passion amoureuse.
De ton silence naît ton chagrin
Et ce n’est pas la faute de l’amour.
Si tu caches le feu, les autres ne le voient pas,
Il ne mérite pas non plus la pitié s’il ne la demande pas.
Claudio MONTEVERDI
Se ‘l vostro cor, Madonna
Se’l vostro cor, Madonna
altrui pietoso tanto
da quel suo degno
al mio non degno pianto
tal hor si rivolgesse
e una stilla al mio languir ne desse,
forse nel mio dolore
vedrìa l’altrui perfidia e’l propr
o errore
e voi seco direste: Ah, sapess’io
usar pietà come pietà desio.
(Giovanni Basta Marini)
Si votre cœur, Madame
Qui est si compatissant pour tout autre,
Qui soit digne d’elle,
Vers mes pleurs indignes
Se retournait maintenant
Et accordait une once de compassion à mon désir,
Peut-être que dans mon chagrin
Il verrait la perfidie des autres et sa propre erreur
Et vous diriez avec lui : Ah, si j’avais su
User de compassion comme j’aimerais moi-même en bénéficier.
Giovanni ROVETTA
Tuo lieto cantai
Tutto lieto cantai, benigno Amore,
Mentre godei del mio bel sol i rai:
Ch’eclissato poi piansi e sospirai
Ed egli in ciel ridea del mio dolore.
Appena vidi il mattutino albore
Ch’in occaso sparito io lo mirai:
E benché splenda ora più bel che mai,
Notte per me restò, piena d’orrore.
Quando di nuovo sol raggio lucente
Nel buio ancor mi fa discerner quanto
S’assomiglia all’estinto il dì nascente,
La cetra mia che s’è rivolta in piant
M’è forza a ritoccar, già che sovente
M’invita un nuovo Apollo a nuovo canto.
J’ai chanté, pleinement heureux, Amour bienfaisant,
Tandis que je jouissais des rayons de mon beau soleil
Qui, lorsqu’il s’éclipsa, me vit pleurer et soupirer.
Et lui, au ciel, riait de ma douleur.
À peine ai-je vu la lumière du matin
avant de la voir disparaître au couchant :
Bien que le soleil brille maintenant plus que jamais,
Pour moi est restée la nuit, pleine d’effroi.
Maintenant que la lumière éclatante d’un nouveau soleil
dans l’obscurité me fait voir à quel point
le jour qui se lève est semblable à celui qui s’en va,
ma lyre, maintenant
transformée en pleurs,
je dois la reprendre,
car un nouvel Apollon m’invite à un nouveau chant.
Giovanni VALENTINI
Deh fuggite gl’Amori
Deh fuggite gl’Amori,
alla caccia pastori.
Ecco Cintia leggiadra,
ecco la bella squadra,
che c’invita co ’l corno
a girar d’ogni intorno questi monti.
Udite, già slegati
i cani che con vezzi ed ululati
par che dican anch’essi:
«Eccoci pronti ai vostri bei lavori.»
Deh fuggite gl’Amori,
alla caccia pastori.
Ecco già scorre il campo,
la fiera non ha scampo;
eccola nella rete
ninfe e pastor correte, o cielo, o stelle, già Clorinda lo assale,
già cade estinto, o fiero, o gran cinghiale.
o cacciatrici fortunate e belle,
o valorosa Clori.
Che Amore, che Himenei,
questi son i trofei,
i trionfi e le palme,
vere glorie dell’alme generose.
Dunque tutti ridenti
e fastosi e contenti,
al suon di corni e voci strepitose,
gridiamo unitamente:
«Viva la caccia, muoiano gl’Amori.
Vivan le cacciatrici e i cacciatori!»
(Giovanni Sforza, Conte di Pora)
Fuyez les Amours,
Sus à la chasse, bergers !
Voici la gracieuse Cintia,
voici le bel attelage,
qui nous invite de son cor
à faire le tour de ces montagnes.
Entendez, déjà détachés
Les chiens qui, par leurs bruyants aboiements, semblent dire :
«Nous voici prêts pour vos bonnes œuvres.
Oh, fuyez les amours !
Sus à la chasse, bergers !
Déjà la campagne grouille,
la bête n’a pas d’échappatoire ;
La voici dans le filet !
Courez, nymphes et bergers !
Ô ciel, ô astres,
déjà Clorinde se précipite sur elle,
déjà il succombe, ce fier, ce grand sanglier.
Ô heureuses et belles chasseresses, ô vaillante Clori.
Pour l’Amour, pour Hymen,
voilà les trophées, les triomphes et les palmes,
les vraies gloires des âmes généreuse.
Alors, tous rieurs et resplendissants et heureux,
Au son des cors et des voix retentissantes,
crions ensemble :
«Vive la chasse, meurent les amours.
Vivent les chasseresses et les chasseurs !»
Barbara STROZZI
L’amante modesto
Volano frettolosi i giorni e presto
un secolo sarà che ti amo Clori
né de’ miei lunghi ossequiosi amori
un picciol guiderdone anco t’ho chiesto.
Amante son, ma candido e modesto
voglio che taciturno il cor t’ adori
e voglio disfogar gli interni ardori col muto fiato di un sospir honesto.
Godati chi di me più fortunato nacque ai diletti impuri.
A me sol basta saper
dalla mia Clori esser amato.
Cosi mai non guerreggia e non contrasta rivalità.
Diverso è il nostro stato:
egli t’ ama impudica, io t’ amo casta.
(Giulio Strozzi)
Les jours passent vite, et bientôt
cela fera un siècle que je t’aime,
O Clori, et pourtant, dans mon amour assidu et incessant,
je n’ai pas demandé une seule petite récompense…
Je suis amoureux, mais au coeur pur et modeste
Je souhaite que mon cœur t’adore en silence
Et je veux étancher mon ardeur intérieure
par le souffle silencieux d’un honorable soupir.
Profite de celui qui, plus chanceux que moi,
est né pour des plaisirs impurs.
Il me suffit de savoir que je suis aimé de ma Clori.
C’est pourquoi il ne che
che nulle querelle ni rivalité.
Notre état est différent :
lui t’aime lascive, je t’aime chaste.
Giovanni VALENTINI
Schiera d’aspri martiri
(Chiama gli occhi a confortare le sue pene amorose.)
Schiera d’aspri martiri,
dà battaglia di morte a la mia vita.
Lume di duo begli occhi, aita, aita.
Mille amorosi arcieri
hannosi il fianco mio per segno eletto,
e sempre acerbi e feri
ivi di saettar piglian diletto.
Ah, che dentro dal petto
è già tuo il mio core una ferita!
Lume di duo begli occhi, aita, aita.
(Gabriello Chiabrera)
Une foule de tourments
Fait de ma vie un combat à mort.
Oh lumière de deux beaux yeux, à l’aide, à l’aide !
Un millier d’archers amoureux
Se sont choisi mon corps comme cible,
Et toujours durs et cruels
Ils prennent plaisir à m’abattre.
Ah, dans mon sei
Mon cœur n’est déjà plus qu’une blessure !
Oh, lumière de deux beaux yeux, à l’aide !
Claudio MONTEVERDI
Al lume delle stelle
Al lume delle stelle,
Tirsi sotto un alloro
Si dolea lagrimando in questi accenti:
O celesti facelle,
Di lei ch’amo e adoro
Rassomigliate voi gli occhi lucenti
Luci serene e liete,
Sento le fiamme lor mentre splendete!
(Torquato Tasso)
A la lumière des étoiles
A la lumière des étoiles,
Tirsi sous un laurier
Pleurait en ces termes :
O lumières célestes
Vous ressemblez aux yeux brillants
De celle que j’aime et que j’adore.
Lumières sereines et heureuses,
Je ressens leurs flammes quand vous brillez !
Giovanni VALENTINI
Quel augellin che canta
Quel augellin che canta
sì dolcemente e lascivetto vola
ora dall’abete al faggio,
ed or dal faggio al mirto,
s’avesse umano spirto,
direbbe: «Ardo d’amore, ardo d’amore.»
Ma ben arde nel core
e parla in sua favella,
sì che l’intende il suo dolce desio.
Ed odi a punto, Silvio,
il suo dolce desio
che gli risponde: «Ardo d’amore anch’io.»
(Giovanni Basta Guarini)
Ce petit oiseau qui chante
Si doucement et gracieusement vole
Tantôt du sapin au hêtre,
Et tantôt du hêtre au myrte,
S’il avait une âme humaine
Il pourrait s’écrier: «Je brûle d’amour, je brûle d’amour.»
Il a bien le coeur enflammé
Et il appelle dans son langage
Pour que son doux amant le comprenne ;
Et écoute bien, Silvio
son doux amant qui lui répond :
«Moi aussi, je brûle d’amour».
Claudio MONTEVERDI
Tu dormi?
Tu dormi? Ahi, crudo core,
tu puoi dormir, perch’in te dorme Amore.
Io piango, e le mie voci lagrimose
a te, che sorda sei,
portano invano, ahimé, l’aure pietose.
Ah, ben i pianti miei
pon far pietosi i venti :
ma te fan più crudele i miei lamenti.
Dors-tu ? Ô cœur cruel,
tu peux dormir, car en toi dort l’Amour.
Je pleure, et mes accents plaintifs,
à toi qui es sourd,
apportent en vain, hélas, mes soupirs.
Ah ! mes larmes peuvent apitoyer les vents,
mais mes lamentations ne font que te rendre plus cruel.